Sauf toi, tous les humains regards
Peuvent s’assurer de ma peine;
Loin de toi, je gis, l’oeil hagard,
Sans voix, et respirant à peine.
Que fais-tu, toi qui n’es aimé
Que de moi seule avec extase ?
Saurai-je desceller le vase
De ton beau sourire fermé ?
Se peut-il qu’il soit admissible
Quand tout dans l’amour est possible
Que je périsse de désir ?
– Bel être qu’on ne peut saisir,
Âme ferme, calme, têtue,
Confiante en des lendemains,
Lorsque, moi, chaque heure me tue,
Pourquoi ne pas tendre ta main
À ma main qui, rien qu’en touchant
Ton poignet nonchalant et triste,
M’indiquerait pourquoi j’existe,
Et me restituerait mon chant !…
Poème de l’amour
Poèmes de Anna de Brancovan, comtesse de Noailles